Focus sur le biométhane : où en sommes-nous en 2022 ?
En 2020, le biométhane représentait 3,9 % des énergies renouvelables dans la consommation finale brute en France. Alors que l’écologie représente désormais un enjeu individuel et institutionnel considérable, qu’en est-il aujourd’hui de l’avancée du biométhane en France ? On fait le bilan.
Une production de biométhane qui tourne au ralenti
C’est un fait, au vu de l’étendue de nos terres agricoles, la France a un large potentiel en matière de production de biométhane. Pourtant, si les Français consomment de plus en plus de biogaz, on observe un retard considérable du pays par rapport à ses voisins européens.
Qui entre la France et l’Allemagne remporte la course au biométhane ?
La France et l’Allemagne sont deux pays aux ressources comparables, mais concernant la consommation du biométhane, les chiffres parlent d’eux-mêmes : notre pays est loin derrière. Actuellement, pour une consommation totale de 458 TWh, la France ne produit que 5 TWh de biogaz par an. Alors qu’en 2017 :
- l'Allemagne produisait déjà 30 TWh ;
- l’Allemagne comptait près de 9 300 unités de méthanisation, contre seulement 609 centrales de biogaz en France.
À savoirDepuis 2017, malgré les aides déployées par l’État pour soutenir la filière, la progression de la filière est lente. Résultat ? L’Allemagne est meilleure élève que la France en matière de production de biométhane. |
Quelles utilisations souhaite-t-on faire du biogaz ?
Les Allemands et les Français ne font pas le même emploi du biométhane. Si l’Allemagne l’utilise pour produire de l'électricité, la France, quant à elle, l’injecte sur le réseau de gaz naturel.
Mais quels sont les objectifs de l’État ? Attribuer au biogaz les mêmes usages que le gaz naturel pour :
- la combustion ;
- le chauffage ;
- la production d’électricité.
Nos ressources peuvent aussi servir d’alternatives aux carburants traditionnels, pour contribuer à la protection de l’environnement et améliorer la qualité de l’air. Grâce aux stations GNV – gaz naturel pour véhicules –, les conducteurs peuvent d’ores et déjà se mettre au vert en profitant d’une mobilité durable.
Le palmarès des régions les plus productives
En 2021, selon une étude menée par le Service des données et des études statistiques (SDES) auprès des gestionnaires de réseaux, les régions qui produisent le plus de biométhane sont :
- le Grand Est (21 %) ;
- les Hauts-de-France (16 %) ;
- la Bretagne (13 %).
En parallèle, on remarque une forte implication de la part de certaines régions. L’Alsace, par exemple, cultive de nombreux projets collectifs avec le soutien d’agriculteurs locaux. Ces derniers y voient un double intérêt : diversifier leurs revenus, et s’engager dans une démarche environnementale.
Des freins d’ordre pécuniaire
Bien que la production de biométhane enregistre une forte croissance, la filière progresse peu en France. La raison ? Son coût est élevé, ce qui le rend peu accessible.
Des coûts de production importants
La production de biogaz est très onéreuse. Elle requiert des ressources financières pour :
- l’approvisionnement en déchets agricoles, alors même que le gaz gris est « gratuit » ;
- les méthaniseurs, dont le coût est trop souvent élevé pour les agriculteurs ;
- le raccordement, qui pose problème car de nombreuses petites structures ne sont pas raccordées.
Le biométhane fait pâle figure face au gaz gris qui circule en grande quantité depuis la Norvège et la Russie.
La fin de l’exonération de la TICGN
Jusqu’à fin 2020, les consommateurs de biogaz étaient exonérés de la TICGN (Taxe Intérieure de Consommation sur le Gaz Naturel). La fin de cette exonération a eu l’effet d’un coup de massue pour le secteur : les fournisseurs ont augmenté leur prix, ce qui a entraîné une baisse des investissements dans le biogaz.
Quel avenir pour le biométhane ?
La diminution de la demande sur le marché français a eu pour conséquence de ralentir la production de biométhane. Pour autant, il n’en demeure pas moins que le biométhane reste un gaz toujours exploitable.
Vers la réduction des ETS
Parmi les projets dans les tuyaux, un dispositif permet aux entreprises de réduire leur ETS (via un système d’échange de quotas d’émission) s’ils ont recours au biogaz. Concrètement, lorsqu’une entreprise achète du biogaz, elle n'acquiert en réalité qu’un mélange de biogaz et de gaz naturel. Pour bénéficier de cette réduction, l’entreprise devra donc fournir une garantie d’origine (GO).
De nombreuses entreprises s'intéressent à cet éventuel dispositif. Elles y voient la possibilité de s’affranchir du quota carbone, mais aussi de soutenir la filière du biogaz.
L’impact du conflit Russie-Ukraine
Si certains projets étaient déjà à l’étude, le conflit Russie-Ukraine pourrait accélérer leur mise en œuvre. Récemment, la France a confirmé sa volonté de réduire sa dépendance aux énergies fossiles qu’elle n’est pas en mesure de produire. Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, s’est exprimée à ce sujet : « Nous devons rapidement réduire notre dépendance aux énergies fossiles, à la fois pour baisser nos émissions de gaz à effet de serre et pour garantir notre indépendance énergétique. Le biométhane, gaz renouvelable, est une des substitutions au gaz naturel que nous devons encourager. »
En ce sens, le 2 mars 2022, le ministère de l’Écologie a pris un arrêté qui augmente la prise en charge des coûts de raccordement des méthaniseurs aux réseaux de gaz naturel. Cette prise en charge passe de 40 % à 60 %. Un bond considérable qui favorise la transition écologique !
Si la France est une terre d’espoir pour la production de biométhane, le déploiement de la filière accuse un sérieux retard en raison des barrières financières. Néanmoins, les récentes actualités pourraient accélérer le développement du gaz vert. Affaire à suivre !