Vers une collaboration permanente entre OPEP et pays tiers ?

En 2016, l’OPEP s’accordait avec une dizaine de pays tiers pour plafonner à court terme leur production de pétrole dans le but de stabiliser les prix du marché. À l’heure où l’Arabie Saoudite évoque une pérennisation de l’entente au delà de l’horizon 2018, le marché du gaz – étroitement lié à celui de l’or noir – retient son souffle. Quel est l’objectif de cet accord ? Quels en sont les enjeux ?

Sommaire

◇ Rappel : l’OPEP, c’est quoi ? ◇

Rééquilibrer le marché en réduisant la production de pétrole

L’accord signé à Vienne le 10 décembre 2016 visait à contrer la dégringolade subie par les cours du brut depuis 2014. Après 2 mois d’intenses négociations, les 14 membres de l’OPEP et 11 autres pays, menés par la Russie, étaient finalement tombé d’accord pour limiter leur production de pétrole. L’objectif ? Rééquilibrer le marché en misant sur l’augmentation corrélative des prix et l’épuisement des stocks mondiaux.

Un accord historique puisque, en plus de marquer la première entente entre les deux camps depuis 2001, il s’accompagnait d’un changement de politique radical de la part certaines parties. L’Arabie Saoudite abandonnait donc sa stratégie de « vannes ouvertes » et acceptait de passer outre ses conflits géopolitiques avec l’Iran, tandis que la Russie consentait pour la première fois à brider sa production de pétrole.

◇ Que retenir du World Oil Outlook 2017 de l’OPEP ? ◇

Aux termes de cet accord, les pays signataires ont convenu d’une baisse globale de la production d’1,8 millions de barils par jour (bpj). Soit une diminution respective de :

  • 558 000 bpj pour les pays hors OPEP ;
  • 1,2 million bpj pour les pays membres.

Bilan positif au terme d’un an de coopération

Afin de veiller au respect de ces quotas, un comité de surveillance mixte a été mis en place. Le Joint OPEC-Non-OPEC Ministerial Monitoring Committee (JMMC) regroupe 3 représentants de pays de l’OPEP (Algérie, Koweït, Venezuela) et 2 pays non-membres de l’organisation (Russie et Oman).

Selon le JMMC, la moyenne du niveau de conformité mensuel des signataires de l’accord au cours de la première année de collaboration a été de 107 %. Le moins que l’on puisse dire, c’est que les parties se sont montrées particulièrement appliquées !

Quant aux résultats, ils sont plutôt encourageants ! La baisse de la production mondiale a permis d’atteindre les objectifs visés : augmentation du cours du pétrole et diminution des stocks mondiaux.

Le niveau du surplus de stocks détenus par les pays occidentaux, bien qu’il demeure élevé, a ainsi été réduit de moitié entre 2016 et 2017. Le prix du baril se porte aujourd’hui plutôt bien, avec une moyenne avoisinant les 70 $. Bien loin du gouffre de 26 $ atteint en février 2016…

 Le Brent, un driver pour le gaz naturel ◇

Les enjeux d’une entente sur le long terme

L’accord de 2016, conclu pour une période de 6 mois à compter du 1er janvier 2017, a déjà fait l’objet de plusieurs renouvellements. Après une première prolongation de 9 mois à compter du 1er juillet 2017, les parties se sont rencontrées le 30 novembre 2017 pour convenir d’un report du terme à fin 2018.

Cependant, le 21 janvier dernier à l’occasion d’une réunion des pays signataires à Mascate, capitale du sultanat d’Oman, l’Arabie Saoudite a manifesté le souhait d’une coopération prolongée au-delà de 2018. Une entente sur le long terme et pour une durée indéterminée qui ne serait pas forcément basée sur les quotas de production de pétrole actuellement en vigueur. Le pays, premier producteur mondial de pétrole et actuel président de l’OPEP, a également évoqué l’élaboration d’une charte afin de fixer un cadre durable à l’accord.

Cette coopération permanente entre l’OPEP et les pays tiers aurait pour objectif de rééquilibrer totalement le marché en résorbant l’excédent de brut, alors que se profile une augmentation prochaine du prix du gazole.

Des perspectives pour le moins incertaines...

Rien n’est encore joué ! La Russie a en effet évoqué une éventuelle sortie de l’accord en cas de flambée des cours. Elle redoute que les américains ne profitent d’une hypothétique crainte de pénurie de la part des investisseurs pour augmenter leur offre en pétrole de schiste.

◇ Quelle politique énergétique pour l’Amérique de Trump ? ◇

L’OPEP a pour sa part évoqué une éventuelle rupture anticipée de l’accord avant la fin 2018 en cas de tension excessive du marché. Un point sur la situation devrait être fait lors de la prochaine réunion de l’organisation internationale, en juin 2018. L’occasion de réévaluer le plafonnement de la production de pétrole en fonction de l’état du marché. À suivre, donc...

Si le devenir de cet accord demeure pour le moment incertain, les résultats obtenus sur le court terme inspireront certainement les partisans de la création d’une organisation de régulation propre à l’industrie gazière. Face à marché du gaz fortement déséquilibré à l’échelle mondiale, l’idée d’une « OPEP du gaz naturel » pourrait donc continuer de faire son chemin.

Source image à la Une : Pixbay - drpepperscott230